Le XIXe siècle : le siècle de l’industrie
Ceci est un article issu de livre L'essentiel de l'histoire économique publié en 2017 par Arnaud Labossiere
La première révolution industrielle
La première industrie à être transformée est celle du textile. Son écosystème est bouleversé par des innovations comme la Spinning Jenny, inventée par HARGREAVES en 1765, qui révolutionne la filature du coton.
Avec la water frame, Richard ARKWRIGHT utilisera l’énergie hydraulique pour augmenter la productivité des filatures de coton. Ce passionné de mécanique, qui commença sa vie professionnelle comme barbier et perruquier, brevette son invention en 1768 et amasse ainsi une fortune considérable. « Son nom restera inséparable des origines de la grande industrie », admet l’historien Paul MANTOUX.
Les innovations ne changent pas seulement l’offre du secteur textile, mais aussi la demande. Avec l’utilisation massive du coton, au détriment de la laine, l’industrie textile séduit une population urbaine de plus en plus prospère. L’immense succès de cette nouvelle fibre permet le développement du prêt-à-porter. Ce qu’on appelle « la folie des indiennes[1] » exprime l’inten-sité de la demande de vêtements en coton imprimé. Comme le montre ZOLA dans Au Bonheur des Dames (1883), l’émergence des grands magasins consolide cette nouvelle forme de consommation dans la seconde moitié du XIXe siècle.
La première révolution industrielle va aussi bouleverser les transports et quasiment inventer la sidérurgie. À partir des années 1840, c’est une fièvre de chemins de fer qui s’empare de l’économie mondiale, avec la construction massive de routes ferroviaires et le développement de grands centres industriels. On peut déceler en amont de cette fièvre une « grappe d’innovations » (SCHUMPETER) dont les deux innovations fondamentales sont la machine à vapeur de WATT (1776) et la locomotive de STEPHENSON (1817).
L’épicentre de cette révolution est d’abord l’Angleterre, puis la France, pays à partir desquels elle va se propager dans le monde entier. Entre 1880 et 1914, le total mondial de kilomètres de chemins de fer passe de 350 000 à 1 000 000. À la différence de l’industrie textile, les constructions ferroviaires et la sidérurgie nécessitent toutefois de lourds investissements. C’est pourquoi les banques anglaises vont drainer l’épargne de tout le pays à travers le développement d’un vaste réseau de banques de dépôt. En France, l’État vient en aide à l’initiative privée en signant la « Charte » des chemins de fer de 1842, laquelle l’engage à couvrir deux tiers des dépenses ferroviaires.
La deuxième révolution industrielle
La deuxième révolution industrielle est celle de la chimie, de l’automobile et de l’électricité. Les pays leaders sont les États-Unis et l’Allemagne, qui prennent une place de plus en plus importante dans l’économie mondiale à partir de la Grande-Dépression (1873-1896). L’américain Thomas A. EDISON est sans doute l’une des figures les plus importantes de cette deuxième révolution industrielle : il est l’inventeur de la première station électrique et le fondateur de l’entreprise General Electric. Dans le domaine chimique, ce sont les entreprises allemandes, comme Bayer ou Höchst, qui prennent une position de leadership technologique et conquièrent de gigantesques parts de marché. On estime qu’elles représentent 140 000 (87,5 %) des 160 000 tonnes de colorants produites dans le monde en 1914.
Tout le monde ne croit pas immédiatement au potentiel de ces innovations. Figure historique du protectionnisme, l’homme d’État français Jules MÉLINE déclare aussi avec assurance à la fin du siècle que « s’il y a bien une chose qui est sûre, c’est que l’automobile n’a pas d’avenir ». Créée en 1896, Renault voit ses effectifs passer de 15 salariés en 1900 à 4 000 en 1913 (soit une multiplication par 266 en treize ans !). Aux États-Unis, quinze millions de Ford T seront vendues entre 1908 et 1925.
Le déclin industriel de la Grande-Bretagne à la fin du siècle : le choix des services
Conséquence d’un choix de développement fondé sur le libre-échange et sur une croissance extravertie dans un monde devenu protectionniste, l’industrie britannique connaît un véritable déclin. Le pays connaît une forme précoce de désindustrialisation, mais aussi de tertiarisation.
L’Angleterre devient un pays leader dans les services financiers : la City est le centre financier du monde, la livre sterling la monnaie internationale et ses banques financent le monde ; et dans les services commerciaux comme le fret (40 % de la flotte mondiale est anglaise). En 1914, le secteur tertiaire représente déjà la moitié de la population active et du PNB. Avec la Llyod's of London (fondée en 1688), l'Angleterre constitue le cœur mondial du métier de l’assurance.
[1] Une indienne était un tissu initialement importé des comptoirs des Indes.